Déménagement avec démontage-remontage d'une presse Breisch Neckartenzlingen

Pour le plaisir du partage d'expérience, nous expliquons ci-dessous comment nous nous y sommes pris récemment, pour démonter une presse de gravure dans une petite ville du nord des Pays-Bas, pour ensuite la remonter à Bruxelles dans notre nouvel atelier de gravure.

L'opération est illustrée ici : https://photos.app.goo.gl/n3H4ZxxfZXEGRtsz8

Il s’agit d’une presse de gravure portant l’inscription BREISCH NECKARTENZLINGEN. (Neckartenzlingen est le nom d'une localité allemande du Baden-Wurtenberg où on présume que la presse a été fabriquée) Le rouleau est large de 75 cm. C’est une machine de conception robuste qui pourrait dater des années 1950 ou 1960 ( ?). Si vous en savez davantage sur cette machine, çà nous intéresse. Les rouleaux sont en acier plein. Les côtés sont en fonte et la machine est boulonnée sur une petite table robuste en hêtre.

Nous avons d’abord effectué une première visite en vue de prendre des mesures pour réaliser des dessins préparatoires. Ces dessins ont servi à réfléchir et à anticiper la manière dont se passerait le démontage-remontage.  Nous avons également estimé le poids des différentes pièces en calculant leur volume puis en le multipliant par la densité de l’acier. Les pièces les plus lourdes sont le gros rouleau et la table, qui font chacune de l’ordre de 200 kg. La machine complète dépasse certainement les 700 kilos.

La solution technique que nous avons imaginé ici est de réaliser une structure en bois servant à maintenir les rouleaux en place pendant le démontage des côtés. La même structure bois a également servi de brancard pour le déménagement du gros rouleau et à également servi à soutenir les rouleaux au remontage. La structure en bois a été construite avant le déménagement. Ce travail a nécessité une grosse demi journée pour une personne. Pour le démontage et le remontage, nous étions 6 personnes avec une camionnette. Le démontage puis le transport vers Bruxelles a nécessité une journée. Le remontage a été plus rapide et a duré environ 5 heures.

On a veillé à marquer l’emplacement de chaque pièce avec du scotch et à remettre les boulons sur leur axe car avec une vieille machine, tout n’est pas nécessairement interchangeable. On a aussi fait des photos au fur et à mesure du démontage afin de pouvoir tout remettre à sa juste place au remontage.

Les étapes du démontage  :
1. Enlèvement du plateau. Il est très lourd. On a construit une sorte de brancard en bois qu’on a posé sur les planches à roulettes pour le transporter
2. Démontage du volant
3. Démontage du couvercle des roues crantées
4. Démontage des roues crantées et de leur support
5. Montage de la structure bois permettant de supporter les rouleaux
6. Démontage du côté avant (côté volant). Il faut d’abord dévisser tous ses boulons, puis extraire  progressivement le côté des axes des rouleaux et des barres en frappant avec maillet et calles de bois.
7. Démontage des barres rondes qui maintiennent les deux côtés
8. Démontage du rouleau inférieur. On peut le porter à deux personnes. Attention, le rouleau inférieur est muni, côté volant, d’un petit ergo encastré qu’il faut scotcher pour ne pas qu’il tombe (cette petite pièce est très importante car sans elle le rouleau ne tournera pas. Cette pièce peut tomber et se perdre si elle n’est pas scotchée)
9. Démontage du rouleau supérieur. Il est extrêmement lourd. On l’a déplacé sanglé sur la structure en bois qui a servi de brancard pour le porter.
10. Démontage du côté arrière

Pour le remontage, c’est l’inverse :
1. Remontage du côté arrière. On le fixe à la table avec ses boulons.
2. Remontage du rouleau supérieur : on le remet sur la table sur sa structure en bois, et on insère son axe dans le côté arrière
3. Remontage des barres rondes et du rouleau inférieur qu’on fixe dans le côté arrière
4. Montage du côté avant qu’on reboulonne.
5. Démontage complet de la structure de soutien en bois
6. Remontage des roues crantée, de leur couvercle, puis du volant
7. Remontage du plateau

Déménager un monstre pareil n'est pas évident. La manutention de tels poids n'est pas sans danger. On possède une expérience de travaux dans le bâtiment et ce n'est pas la première fois qu'on est confronté à des questions de manutention compliquée. En outre on avait ici soigneusement tout préparé et on était au rez-de-chaussée aux deux endroits, avec suffisamment de bras. Ce sont des avantages de taille. Sans tout cela, cela n'aurait probablement pas fonctionné.

Sarah et Pierre

Bravo et beau travail. Superbe démarche quand on a pas les chèvres et palans. Superbe presse.
Je vois que vous avez remonté immédiatement la presse. Avez-vous tout nettoyé, décapé et re-huilé ? C'était l'occasion.
Vous avez sur le forum un post sur l'entretien des presse.
L'huile est préférable à la graisse, normalement.
Je vais essayer de voir sur un autre micro plus récent vos images si elles peuvent s'agrandir, j'aimerais un détail du système de pression et ce qui pourrait être le système de relevage.
Si je comprends bien, l'entraînement se fait par le rouleau du bas.
Le système de pression se fait avec une zone de cartons (ont-ils encore un peu de souplesse ?)
et le système de relevage par tringles dont le haut coulisse ce qui permet de faire jouer l'élasticité des cartons.
Est-ce bien cela ?
Dernier détail. Au vu du poids du plateau, l'adjonction de sécurités en bout de plateau ne serait pas inutile. Même si la remontée des rouleaux réduit un peu les risques (plateau tiré au maximum pour engager les langes). Vous connaissez votre presse, mais attention particulièrement si vous la confiez à quelqu'un d'autre.

Les images du démontage-remontage de la presse de Sarah et Pierre

Merci, Pierre. Nous aussi on trouve que c'est de la belle machine et on en est assez fiers.

On l'a nettoyé et rehuilé, mais après remontage. A refaire, cela aurait sans doute été préférable avant. Mais cela ne se mettait pas dans le planning.

On a nettoyé la vieille graisse des rouages au White Spirit, puis on a remis de la nouvelle : de la graisse épaisse comme on met pour les boîte de vitesses, qui a la consistance d'une gelée. Pour les axes du rouleau, on a remis une graisse plus fluide genre huile de chaine à vélo, car l'épaisse ne s'y introduisait pas.

On a repoli rouleaux et plateaux et tout ce qui était en fer nu avec un "scotch brit", un abrasif grain 320 (un abrasif qui ressemble à celui que l'on trouve sur les éponges pour faire la vaisselle et qu'on trouve en magasin de bricolage). On a utilisé cela avec du pétrole, parce que ça limite un peu la poussière. On a poncé de manière homogène pour ne rien déformer (bien qu'on doute fort qu'avec un grain 320, on risque d'entamer le métal). ça nous a pris une petite journée à deux pour tout briquer.

Maintenant, la presse est bien plus pimpante que sur les photos. Auriez-vous un conseil pour qu'elle le reste ? Genre un produit comme une cire ?

On a aussi fait deux lattes en bois qu'on a boulonné aux extrémités du plateau pour faire des arrêts. Le risque de chute du plateau en cas de distraction n'est effectivement pas à prendre à la légère, car vu son poids, on risque dans le meilleur des cas de massacrer le plancher, et dans le pire d'y laisser ses pieds.

L'entrainement du plateau se fait par le rouleau du bas, effectivement. Le rouleau inférieur possède deux parties crantés contre les côtés, et il existe deux crémaillères au revers du plateau. On trouve le plateau trop court car on voudrait un jour imprimer de plus grands formats. On projette de remplacer le plateau d'acier par un plateau plus long qu'on découperait nous même. Ce panneau ne se mettra plus en mouvement en étant entrainé par les crans du rouleau inférieur (puisqu'on est bien incapable de recréer des crémaillères en acier) , mais avec la pression entre les deux rouleaux. On ne sait pas avec quoi faire ce nouveau plateau. Des copains graveurs nous ont parlé du Trespa. Quelqu'un a une idée de ce qui est le mieux ?

Le système de relevage possède effectivement des cartons permettant d'amortir la pression. Mais c'est vrais, comme tu le fais remarquer, qu'ils sont vieux et sont devenus tout durs. On y avait pas pensé, mais on les remplacera. Merci du conseil.

Sarah et Pierre

Merci beaucoup pour cette longue et précise description, de cette réponse et de l'ensemble de la démarche. Elle servira à d'autres graveurs, c'est certain.
Pour la longueur du plateau et les crémaillères, je n'ai aucune formation de mécanicien pour éventuellement en trouver de nouvelles.

Pour le Trespa, je ne sais pas, nom générique : stratifié haute pression (HPL). J'ai toujours pensé au mélaminé ou stratifié en masse, par feuille de kraft dans de la résine phénolique, que je pense être plus résistant à la pression qu'un stratifié avec fibre de bois, mais je peux totalement me tromper. Le site https://plaqueplastique.fr/panneaux-trespa/ à l'air d'être assez clair, je ne sais si leurs vendeurs sont vraiment à l'écoute pour les appeler ou passer un mail. En tous cas, cela me donne l'envie de commander des guide de hauteurs pour lino, bois 5 mm et autres configurations diverses pour mes deux presses. Vous avez aussi une explication sur les plateaux sur le site de Lorenzo Proca et sûrement une autre adresse de fournisseur.

Pour les cales amortisseur, j'ai une presse avec de très vieux cartons bois bien compressés qui me donnent satisfaction. Pour la deuxième, les cartons gris étaient incompressibles. J'ai tout remplacé par du carton bois. Erreur, beaucoup trop souple. Et c'est une presse qui sert surtout pour passer de la taille d'épargne, donc pas trop en puissance pour les tasser. J'ai finalement remis les cartons gris avec le renouvellement d'un quart à un tiers en carton bois neuf (couleur ivoire soutenu).